Le dosage de la procalcitonine est-il un marqueur prédictif de la sévérité d’une cellulite odontogène ?
Bertholus C, Schouman T, Aubry A, Hausfater P. Is procalcitonin a useful biomarker for the risk stratification of facial cellulitis? J Cranio Maxillo Facial Surg 2016; 995-7.
Résumé :
Il s’agit d’une étude prospective monocentrique menée dans le Service d’Accueil des Urgences de nuit de la Pitié Salpétrière de Paris. Quatre-vingt-deux patients consécutifs avec un diagnostic de cellulite faciale ont été inclus durant la période d’observation (mars à Septembre 2010). Au moment de l’admission, une mesure de la procalcitonine (PCT) été effectuée. Le critère de jugement principal était la nécessité d’un drainage chirurgical. Les critères secondaires étaient la durée de l’hospitalisation et la nécessité d’une reprise chirurgicale.
Sur les 82 patients, 12 patients ont été exclus pour données manquantes (valeur de la PCT ou données cliniques). Parmi les 70 dossiers complets, il y avait 33 hommes et 37 femmes avec une moyenne d’âge de 35 ± 14 ans. Soixante-et-un patients ont été hospitalisés avec une durée moyenne de séjour de 3 jours Les signes cliniques loco-régionaux étaient le trismus (33%) et l’odynophagie (24%). Quarante-huit patients (68%) ont bénéficiés d’un drainage chirurgical et seuls six d’entre eux avaient une valeur de la PCT supérieure à 0.25ng/mL. Une élévation de la PCT (valeur normale < 0.1ng/mL) avait une sensibilité et une spécificité respectivement de 30% et 100%, pour prédire le recours à un drainage chirurgical.
Les auteurs de cette étude concluent que le taux de PCT effectué dans le cadre de la prise en charge des cellulites bactériennes d’origine odontogène n’avait qu’un intérêt limité.
Commentaires :
La prise en charge des patients présentant une cellulite faciale reste encore actuellement une préoccupation majeure de nos services hospitaliers d’Odontologie, en raison de ses difficultés d’évaluation pronostique et de son risque évolutif. Parmi les marqueurs protéiques de l’infection, la PCT est considéré aujourd’hui comme étant un des meilleurs marqueurs de l’infection bactérienne systémique (sepsis). En plus de son intérêt diagnostic (distinction entre l’origine bactérienne et virale d’une infection), il a été démontré que la PCT était un marqueur pronostic de la sévérité des infections (principalement en cas de pneumopathie et chez les enfants).
En revanche, cette étude confirme la faible performance de ce test biologique en cas d’infections localisées comme il l’a été déjà démontré pour les abcès des parties molles et l’appendicite.
Le protocole PENT-E peut-il être proposé comme traitement médical des ostéochimionécroses des maxillaires ?
Owosho AA, Estilo CL,Huryn JM, SaeHee KY. Pentoxifylline and tocopherol in the management of cancer patients with medication-related osteonecrosis of the jaw: an observational retrospective study of initial case series. Oral Surg Oral Med Oral pathol Oral radiol 2016; 122: 455-9.
Résumé :
Il s’agit d’une étude observationnelle rétrospective portant sur 7 patients (4 femmes et 3 hommes âgés de 53 à 68 ans) traités pour un cancer (tumeur solide avec métastases osseuses et myélome multiple) par des médicaments antirésorbeurs (bisphosphonates, denosumab, sunitinib) ayant déclaré une ostéochimionécrose des maxillaires (ONM) au cours de leur traitement. Trois patients ont présenté une ONM de stade 3, trois patients une ONM de stade 2 et un patient une ONM de stade 0.
Une approche conservatrice, non chirurgicale dénommée PENT-E, basée sur la co-administration de pentoxiphylline (400 mg, deux fois par jour) et de tocophérol (400 UI, deux fois par jour) a été proposée à l’ensemble des patients pour une durée moyenne de traitement de 16,8 mois en plus de la prise en charge médicale classique recommandée. Durant la période de suivi, des séquestres osseux mobiles ont été retiré chez deux patients.
A la fin de la période d’observation, les 7 patients présentaient une disparition complète des symptômes (douleur et suppuration) ainsi qu’une amélioration des signes radiologiques. Pour deux, la cicatrisation osseuse (avec un comblement total du défaut osseux initial) a été complète, pour quatre elle n’a été que partielle, et aucune modification radiologique n’est observé dans un cas. Aucun effet indésirable majeur n’est rapporté.
Commentaires :
Différents traitements médicaux et chirurgicaux ont été proposés dans la prise en charge des ONM. De nombreux protocoles médicaux (optimisation de l’hygiène buccodentaire, bain de bouche antiseptique, traitement antibiotique et antalgique, biostimulation à l’aide de laser de faible intensité, tériparatide …) utilisés seuls ou combinés existent dans la littérature. La thérapeutique médicale évaluée dans cette étude est basée sur l’action bénéfique et synergique de la pentoxifylline et de la vitamine E sur la trophicité et la cicatrisation tissulaire. Cette association semble donc prometteuse. Elle a déjà démontrée son efficacité dans le traitement des ostéoradionécroses (ORN) des maxillaires et dans le traitement des ulcères veineux et la claudication intermittente des membres inférieurs. Les résultats de cette étude montrent une efficacité relative de cette association. Si les 7 patients sont améliorés cliniquement seulement 2 l’étaient radiologiquement. Les limites de cette étude sont nombreuses (taille réduit de l’effectif, choix de la panoramique dentaire comme outil mesure de la cicatrisation osseuse, absence de groupe contrôle témoin positif avec la prise uniquement d’antibiotique et d’antalgique et témoin négatif avec prise de placebo…). De futurs essais cliniques seront nécessaires pour valider l’efficacité thérapeutique de cette association dans le traitement des ONM, et si elle constitue une bonne alternative aux traitements conservateurs existants déjà validés.