Les papillomavirus dans les cancers de la tête et du cou.
Garbuglia AR. Human papillomavirus in Head and Neck Cancer.
Cancers 2014, 6, 1705-26
Depuis quelques années, le papillomavirus (HPV) a belle presse en cancérologie orale et est considéré comme un facteur étiologique tout comme l’alcool et le tabac. Cependant, beaucoup de questions restent en suspens sur son implication dans la cancérogénèse des carcinomes épidermoïdes de la tête et du cou. Cette revue de littérature effectuée par une équipe italienne de virologie fait le point sur l’infection HPV au niveau de la cavité orale et de l’oropharynx.
L’article, bien construit, reprend tout d’abord les aspects et la classification des HPV. Ainsi les papillomavirus appartenant au genre Polyomavirus sont des virus ubiquitaires. Actuellement, 170 HPV humains ont été identifiés par approche métagénomique et sont classés génotypiquement en 5 sous groupes : alpha, beta, gamma, mu et nu.
La deuxième partie de cet article traite de l’infection à HPV en fonction des sites anatomiques et en fonction de leur potentiel carcinogène. Les HPV alpha cutanés sont considérés à faible risque. Les HPV muqueux à haut risque sont corrélés au développement de cancer du col de l’utérus et anal (HPV16, HPV18, HPV33, HPV58,…).
A l’exclusion du nasopharynx, les cancers de la tête et du cou sont responsables de 300 000 morts par an dans le monde. Le taux des cancers de la cavité orale est en nette augmentation chez les femmes. Hormis le tabac et l’alcool, d’autres facteurs de risque sont suggérés car 15 à 20% des cancers tête et cou surviennent chez des patients n’ayant aucune intoxication éthylo-tabagique et que le nombre des cancers augmente dans les pays développés alors que la consommation éthylo-tabagique diminue.
Plusieurs auteurs rapportent la présence de HPV dans la cavité orale comme facteur de risque des cancers oraux et oropharyngés. Une prévalence de 22% a été retrouvée sur 253 biopsies de cancers tête et cou avec pour 89% du HPV16. La prévalence de HPV dans les carcinomes amygdaliens atteint de nos jours 70% et 6 à 10% dans les autres cancers de la tête et du cou.
Les cancers oropharyngés HPV+ sont distincts des autres cancers d’un point de vue épidemiologique. Ce sont des cancers retrouvés chez des personnes plus jeunes avec une prédominance masculine dont le pronostic est meilleur.
La prévalence de HPV au niveau de la cavité orale dans la population en bonne santé est de 4,5% et le sex ratio égal à 1. Un tiers d’entre eux est porteur de HPV16.
Le risque d’infection orale à HPV est augmenté chez les patients séropositifs au VIH avec une prévalence de 35% chez les femmes et 45% chez les hommes.
Cette revue se termine par l’analyse des méthodes de détection du HPV par biologie moléculaire. Actuellement, les méthodes de détection de routine utilisent la PCR mais la prévalence de nouveaux génotypes dans la cavité orale devrait augmenter avec l’introduction des nouvelles méthodes de détection de métagénomique.
Comme les changements du statut épithélial retrouvés au niveau du col de l’utérus ne sont pas transposables dans les cancers oraux et oro-pharyngés, il est difficile de définir une mesure préventive. L’auteur propose de répéter le test HPV après 6 mois et 12 mois quand il a été détecté au niveau de la cavité orale, spécialement s’il est à haut risque carcinologique, si le patient a une dysplasie anale ou du col de l’utérus ou s’il présente une immunodépression.
Commentaire :
Cet article est riche d’informations sur la classification des papillomavirus. Cependant, les données sur le rôle de HPV dans la genèse des cancers de la tête et du cou sont polymorphes mettant à mal son implication dans un lien causal direct. Sa présence est un facteur pronostique favorable sur une réponse thérapeutique à la radio-chimiothérapie dans les carcinomes épidermoïdes amygdaliens de l’adulte.